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L’enthousiasme des Français pour les réformes a cédé la place au doute et à la lassitude

Pour la première fois depuis 2017, la volonté de « préserver la France et de protéger son identité » est devenue majoritaire aux yeux des Français dans le baromètre Ifop-No Com pour « Les Echos ». Les termes mêmes de « transformation » et de « réforme » ont chuté dans l’opinion, au fur et à mesure que montait le « réflexe souverainiste »

C’était il y a quatre ans à peine mais cela paraît une éternité. « Le protectionnisme, c’est la guerre », lançait Emmanuel Macron dans l’entre-deux-tours de la présidentielle. L’objectif du fondateur d’En marche était alors de se poser en moderniste – il prônait « une transformation complète » et même une « révolution » – et de dénigrer sa rivale, Marine Le Pen, accusée de ne pas être « dans le réel ». Le discours a séduit. Mais depuis, le président de la République a déjà très largement rééquilibré sa promesse de « libérer, protéger », en faveur du second terme. La crise des « gilets jaunes » et l’épidémie de Covid, inédites, sont passées par là. Et c’est peu dire que l’opinion publique a changé.

« Préserver la France »

A l’approche de la fin du quinquennat, l’enthousiasme suscité par l’idée même de transformation a cédé la place au doute, à la résistance au changement et à la montée du « réflexe souverainiste », révèle le « baromètre de la transformation de la France » réalisé par l’Ifop pour l’agence No Com, en partenariat avec « Les Echos » et Radio classique. Selon ce sondage, mené auprès de presque 2.000 personnes avant les régionales et publié ce jeudi, la volonté de « préserver la France et de protéger son identité » est devenue majoritaire, pour la première fois depuis 2017. Pour 52 % des Français, la priorité, pour les années qui viennent, est de « préserver la France telle qu’elle est pour protéger son identité face au monde qui change ». Soit 21 points de plus qu’il y a quatre ans.

Une opinion en doute, en quête d’un modèle alternatif.

Pierre GiacomettiFondateur de No Com

A l’inverse, la proportion de ceux qui jugent qu’il faut « transformer en profondeur » le pays pour « l’adapter au mieux au monde qui change » a chuté de 69 % à 48 %. Dans la même veine, presque les deux tiers des Français (64 %) veulent aujourd’hui que les autorités « protègent les emplois traditionnels », soit 14 points de plus en quatre ans, plutôt que « s’engager résolument dans la révolution numérique ». Les jeunes sont la seule catégorie d’âge à encore souhaiter, à 55 %, la transformation de la France. Les classes aisées aussi, à hauteur de 59 %, mais elles étaient 80 % en 2017.

Sur le plan politique, la demande de préservation identitaire est très forte dans les anciens électorats de Jean-Luc Mélenchon (58 %) et surtout de Marine Le Pen (68 %), mais encore minoritaire dans ceux d’Emmanuel Macron (39 %) et de François Fillon (45 %). Le terme de « transformation » évoque toujours « quelque chose de positif » aux yeux de six personnes sur dix. Mais il suscite plus que jamais de la « méfiance », de l’« inquiétude », ainsi que de la « lassitude » et de l’« incompréhension ».

Le mot « réforme » était jugé positivement par 70 % des Français en 2017 ; il ne l’est plus qu’à 49 %. « L’univers du négatif a gagné du terrain. Nous sommes passés d’une transformation consensuelle à une transformation controversée », résume Pierre Giacometti, le fondateur de No Com, parlant d’« une opinion en doute, en quête d’un modèle alternatif ».

« Inquiétant »

Même s’ils sont totalement partagés dès que l’on aborde la question des prix des carburants, entre la priorité à l’écologie et celle au pouvoir d’achat, plus de huit Français sur dix jugent « possible » un autre modèle de transformation, avec pour principaux leviers la protection et la souveraineté. Les deux tiers d’entre eux s’accordent à dire que la France ne s’est pas transformée, portant un regard négatif sur l’action d’Emmanuel Macron, si ce n’est pour faciliter la création et le développement des entreprises. Le regard porté sur le quinquennat est noir. Il l’est tout autant sur l’Europe : 57 % des Français réclament que leur pays, à l’avenir, « soutienne clairement l’objectif de moins d’Europe », contre 44 % en 2017.

Invité à commenter cette enquête, Michel Barnier , a jugé « inquiétante » la « lassitude » des Français. « La transformation ne peut pas se décréter d’en haut, c’est peut-être ça le problème des quatre années dernières », a souligné l’ancien ministre et ancien commissaire européen, taclant Emmanuel Macron et sa théorie des « premiers de cordée ». « L’adaptation qui est si nécessaire doit être mieux partagée. La clé, c’est qu’on ne peut pas faire cela contre les citoyens et sans eux », a insisté ce membre des Républicains, revenu dans le débat public à l’approche d’une présidentielle au cours de laquelle il entend être « utile ». Pour lui, une chose est sûre en tout cas : avant la présidentielle , ce n’est « pas le moment de rouvrir un débat mal conduit » sur la réforme des retraites.

Article dans les Echos du 1er juillet 2021

Retrouvez l’intégralité de la présentation du Tableau de Bord de la Transformation de la France en partenariat avec Les Echos et Radio Classique et notre invité exceptionnel Michel Barnier : https://drive.google.com/file/d/1meHOvlw5uE8Vrh8ODVhHJ46caHVsF34Z/view

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